Actus cinéma

Un acteur peut-il vraiment réussir sans passer par la case blockbuster ?

Emily Blunt et Charlize Theron en soeurs maléfiques du Chasseur et la reine des glaces

© Universal Pictures International France, DR

Alors que sortait ce mercredi Le Chasseur et la reine des glaces, qui réunit Charlize Theron, Jessica Chastain et Emily Blunt sur grand écran, on s'interroge aujourd'hui sur les choix de carrières des acteurs. Est-il, à l'heure actuelle, encore possible de réellement se faire une place dans le cinéma mondial sans passer par la case blockbuster ?

Super-héros et grosses productions : le passage obligé d'une carrière au sommet ?

Difficile d'y échapper : les super-héros et autres blockbusters en tout genre envahissent les écrans depuis plusieurs années maintenant. Et de plus en plus, celles et ceux que l'on découvrait à travers un cinéma dit indépendant, finissent par succomber aux sirènes des majors hollywoodiennes. Oscarisée en 2004 pour Monster, Charlize Theron a depuis été vue dans un certain nombre de films à gros budgets et participera prochainement à Fast & Furious 8. Jessica Chastain, révélée par le Tree of Life de Terrence Malick, s'essaye à présent à l'action et au fantastique grand public pour Le Chasseur et la reine des glaces, tout comme Emily Blunt, découverte dans les films de Pawel Pawlikowski ou Jean-Marc Vallée. Et les exemples du même type ne manquent pas : Scarlett Johansson a fait ses armes chez Sofia Coppola avant de jouer pour Michael Bay puis d'incarner Black Widow, Eddie Redmayne a rejoint Jupiter : Le destin de l'univers et Les Animaux fantastiques après son Oscar pour Une merveilleuse histoire du temps, et Jesse Eisenberg s'est illustré chez David Fincher ou Woody Allen avant de prêter ses traits à Lex Luthor. On peut donc se poser la question : auraient-ils la même notoriété aujourd'hui s'ils avaient refusé l'appel des gros studios ?

Le choix de l'exigence

S'il est bien un acteur qui a toujours mis un point d'honneur à ne pas "vendre son âme au diable" et à garder son indépendance, c'est Joaquin Phoenix. La plus grosse production à son actif ? Gladiator et ses 100 millions de dollars de budget (bien loin des 150-200 millions dépensés aujourd'hui par les majors), grâce auquel il a d'ailleurs décroché sa première nomination aux Oscars. Pour le reste, le comédien peut se targuer d'une filmographie exigeante, qui l'a fait tourner avec les plus grands, de Gus Van Sant à Woody Allen, en passant par James Gray ou Paul Thomas Anderson. Ce ne sont pourtant pas les occasions qui ont manqué à l'acteur pour rejoindre les grosses machines de l'industrie du cinéma moderne. Sur ces trois dernières années seulement, Phoenix a ainsi été tour à tour sollicité par la Warner pour camper Lex Luthor, puis par Marvel pour jouer Doctor Strange. Avec chaque fois la même réponse négative à la clé, l'acteur craignant de devoir se soumettre aux requêtes d'un gros studio et ainsi de perdre sa liberté. Néanmoins, il est rare de voir une grande star de cinéma acquérir une réputation internationale sans une seule grosse production à son CV. Le tout étant encore de la choisir avec soin. Joaquin Phoenix a eu Gladiator, au même titre que Leonardo DiCaprio a eu Titanic en 1998. Une fois sa notoriété faîte, celui qui vient de recevoir un Oscar pour The Revenant s'est forgé une carrière solide en s'entourant des meilleurs cinéastes au monde plutôt que de chercher à tout prix à rejoindre le prochain carton des salles obscures. L'acteur a ainsi refusé des rôles tels que Anakin Skywalker, Robin, ou encore Spider-Man.

Un pari sur l'avenir

Si beaucoup débutent dans le cinéma indépendant avant d'atterir dans l'univers des grosses productions hollywoodiennes, certains font l'inverse. Robert Pattinson en est une parfaite illustration, lui qui a lancé sa carrière en participant à deux volets de Harry Potter avant de décrocher le rôle d'Edward Cullen dans la saga Twilight. Si le premier film relatant la romance d'un vampire et d'une humaine ne bénéficiait pas d'un budget démesuré, l'immense succès public qu'il a connu a permis d'augmenter progressivement les coûts de production des suites pour en faire peu à peu une franchise majeure des salles obscures et un titre phare du divertissement de masse. Mais une fois libéré de son personnage au teint blafard, Pattinson a refusé le rôle de Christian Grey dans Cinquante Nuances de Grey pour se concentrer sur un cinéma beaucoup plus confidentiel, profitant ainsi de sa notoriété pour tourner à deux reprises sous la direction de David Cronenberg (Cosmopolis, Maps to the Stars) ou pour des cinéastes tels que David Michôd et Werner Herzog.

Finalement, si le passage par la case blockbuster - ou production très grand public selon les cas - semble presque inévitable, il reste en réalité avant tout un tremplin vers le cinéma mondial et un moyen d'affiner ses choix de carrière. Rien n'empêche en effet de jongler entre les deux univers tel que le font actuellement des stars comme Michael Fassbender, capable d'enchaîner Shame et X-Men : le commencement la même année, ou Jennifer Lawrence, aussi à l'aise en Mystique ou en Katniss Everdeen que dans le cinéma de David O. Russell. Mais certains préféreront, au sortir de cette expérience, se faire une spécialité des grosses productions, ou à l'inverse, s'orienter vers des longs-métrages plus indépendants. N'oublions pas enfin que blockbuster n'est pas nécessairement antonyme de qualité. Pour n'en citer que quelques uns, on peut notamment penser aux récents Interstellar ou Mad Max : Fury Road, quasi unanimement acclamés par la critique autant que par le public.

publié le 24 avril, Pauline Julien

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