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Comic Con - Louis Leterrier : "Pour Hulk, je voulais Ruffalo, Marvel a dit non"

Louis Leterrier

© Pauline Julien, DR

Parrain de la première édition du Comic Con de Paris, Louis Leterrier a ouvert l'événement via une masterclass particulièrement intéressante, où il a accepté de retracer son parcours sans langue de bois. Morceaux choisis.

Né d'un père réalisateur et d'une mère costumière, le cinéaste a grandi sur les plateaux de tournages. "Je ne voulais pas faire comme papa et maman", confie-t-il pourtant, "donc j'ai d'abord été musicien". Mais celui qui s'amuse à réaliser des courts-métrages tous les week ends avec son ami Ali Baddou se rend vite à l'évidence : il veut tenter sa chance. Mais il explique : "À l'époque, les films français ne me parlaient pas, à part peut-être Subway ou Le Grand Bleu. Moi j'ai grandi avec Star Wars, Indiana Jones, Retour vers le futur. Donc mes parents ont gentiment accepté de m'envoyer faire des études de cinéma à New York". Là, il comprend vite que les places derrière la caméra seront très chères et apprend donc tous les métiers.

Sa première expérience sur un long-métrage ? Il s'en souvient comme si c'était hier : "J'étais stagiaire sur Alien, la résurrection de Jean-Pierre Jeunet, mais j'étais tellement loin du plateau que je ne voyais rien. Et un jour, il y a eu un problème technique sur le tournage que j'ai réussi à résoudre. Alors je suis devenu superviseur des effets visuels. J'étais sur le tournage en permanence avec Jeunet, c'était génial. La nuit, j'étais au milieu de ce vaisseau spatial avec les créatures, les aliens". Une première expérience qui lui a en outre appris les difficultés du métier : "J'ai vu quel était le rapport direct entre un réalisateur et le studio. Et entre Jean-Pierre Jeunet et le studio, c'était un rapport un peu compliqué. Jean-Pierre avait été engagé pour son visuel mais en fait, le studio voulait autre chose. Je dis souvent qu'on se fait engager pour quelque chose de très précis et il y a toujours un moment, pendant le tournage ou pendant le montage, où le studio veut exactement le contraire de ce pour quoi il vous a engagé".

Sa rencontre avec Luc Besson sur Jeanne d'arc sera également déterminante, puisqu'elle lui ouvrira les portes du Transporteur, sur lequel il avait été engagé comme assistant 2ème équipe, avant d'en devenir le réalisateur : "Un jour (Luc) me parle du Transporteur, dont devait s'occuper Corey Yuen. Mais Corey est en retard, alors je commence un peu à préparer, je choisis quelques décors, des voitures, des costumes. Il n'est toujours pas là donc je commence le casting, je choisis Berléand, Jason Statham... Corey arrive finalement une semaine avant le début du tournage. Il était sur un autre film. Il ne parle pas bien anglais, il ne parle pas du tout français, et la veille du tournage, il vient me voir dans ma chambre avec le producteur et me dit 'Je suis trop fatigué'. Le premier assistant ne voulait pas le faire, et, un peu comme dans les films, tout le monde s'est retourné vers moi. J'ai commencé avec des scènes de voitures. Corey était là mais il se reposait, et finalement, j'ai réalisé tout le film. Corey a fait les chorégraphies et les scènes de bagarres".

Arrive ensuite sa première aventure hollywoodienne avec L'Incroyable Hulk, qui se solde par un échec à sa sortie en 2008. Il raconte : "Moi j'adore Iron Man (...) donc je suis allé aux États-Unis et j'ai passé trois mois là-bas à démarcher tous les studios, surtout Marvel, j'ai fait une vraie campagne de séduction en les pitchant sur Iron Man. Puis je repars en France, j'achète un nouvel appartement. Je n'avais pas encore défait les cartons qu'ils m'appellent pour me dire 'Faut que tu déménages, on va te donner un film', je demande 'Iron Man ?', 'Non, Hulk'. (...) J'avais adoré Hulk mais pour moi c'était Lou Ferrigno dans la série télé". Une fois l'accord trouvé, Louis Leterrier engage un acteur qu'il aime beaucoup pour incarner le super-héros : Mark Ruffalo. Mais "Marvel a dit 'non, non, Mark Ruffalo n'est pas du tout connu, tu vas prendre Edward Norton'". On connaît la suite...

Mais son expérience la plus difficile reste Le Choc des Titans, sur lequel les problèmes s'accumulent : choix de casting refusé (Leterrier voulait Michael Fassbender mais "il fallait prendre la star montante, Sam Worthington"), changement de scénaristes, et surtout post-conversion du film en 3D pour surfer sur le succès d'Avatar. "Ils nous ont montré un test de 20 plans, c'était une catastrophe. Tout le monde l'a dit. Mais ils ont quand même décidé de le faire en 3D. Je n'ai rien pu dire. Donc, on a de la chance parce que le film a très très bien marché, mais je garde quand même un goût amer de cette expérience", confesse le cinéaste.

Après un long break, Louis Leterrier se lance dans Insaisissables, un "scénario que personne ne voulait réaliser" et son deuxième plus gros succès à ce jour. Deux suites sont d'ores et déjà prévues. Côté projets, le Français n'est pas en reste. "J'ai failli faire Fast & Furious 8", lance celui qui espère désormais pouvoir s'atteler à une adaptation qui lui tient à coeur : "J'ai tenté pendant six ou sept ans d'adapter la BD Blacksad en France avec Thomas Langmann mais on n'a pas réussi. Donc maintenant que j'ai les droits, je pense le faire aux États-Unis".

publié le 26 octobre, Pauline Julien

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