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En mai fais ce qu'il te plaît : rencontre avec Alice Isaaz et Olivier Gourmet

En mai fais ce qu'il te plaît

© Jean-Claude Lother, DR

En salles le 4 novembre prochain, En mai fais ce qu'il te plaît, nouveau film de Christian Carion, s'intéresse à l'exode de 1940 alors que le France est plongée dans la Seconde Guerre mondiale et doit faire face à l'invasion allemande. À l'occasion de la sortie du film, nous avons pu nous entretenir avec Alice Isaaz et Olivier Gourmet, interprètes respectifs de l'institutrice et du maire du petit village qui décide de prendre la route.

Olivier Gourmet

Qu'est-ce qui vous a plu dans le personnage que vous a proposé Christian Carion ?

Ce côté héroïque du personnage qui emmène tout un village derrière lui et surtout les valeurs qu'il véhicule. C'est un emblème de la République qui a existé, le grand-père de Christian Carion, même si ce n'est pas complètement son histoire. Il portait en lui le respect de la République et des lois. Mais aussi cet élan de générosité et d'humanité, cet effort commun et cette responsabilité en temps de crise et même en dehors.

Avant de vous lancer dans le film étiez-vous familier de l'histoire de l'exode de 1940 ?

Je suis né 18 ans après la fin de la guerre. Mes parents ont vécu l'exode. Ils se sont fait arrêter par la police allemande. Mon grand-père paternel était dans un camp de travail en Allemagne. Mon grand-père paternel a emmené sa famille dans le Sud de la France un peu avant. Mon père m'en parle toujours, de cette chance qu'ils ont eu : que des gens leur aient ouvert leurs portes, donné un toit et de la nourriture.

En marge de votre histoire personnelle, le film vous a-t-il apporté un regard neuf sur la situation ?

Non mais je pensais que c'était bien d'en parler. On a une liberté de parole et on peut faire à la fois un cinéma de pur divertissement avec des comédies qui font du bien, et un autre avec lequel on peut un tant soit peu sensibiliser les gens autrement, poser une réflexion, un regard différent sur l'Histoire et ce qu'elle nous a laissé. C'est un western dans sa forme, avec énormément de soin apporté à l'image, donc c'est grand public avec en toile de fond un vrai sujet, humain et historique.

Au vu du contexte actuel, pensez-vous que ce genre de film puisse faire changer le regard qu'ont les Français ou les Belges sur les déplacements de population ?

Peut-être. Le film ne se pose pas comme moralisateur, c'est juste un gros élan d'espoir sur la façon de réagir à un terrible moment de l'Histoire. Le côté grand public touchera surement plus de gens, notamment les jeunes. Si un film permet ne serait-ce qu'à une personne d'envisager les choses de manière plus solidaire et humaine c'est peut-être pas perdu.

C'est un film qui fait beaucoup écho à l'actualité ?

C'est le hasard car Christian l'avait en tête bien avant. Ça a effectivement un vrai écho, même si c'est différent. Cela doit être terrible pour tous ces gens : abandonner ses terres sans savoir de quoi sera fait le lendemain, je n'ose même pas l'imaginer. À l'époque c'était compliqué mais en même temps ils partaient pour un pays qui n'était pas si éloigné (la Belgique, ndlr), c'est plus facile de refaire sa vie, d'autant plus à cette époque-là. Imaginez pour quelqu'un qui vient de Syrie où ils ont une culture, une religion, une tradition, une langue différentes, c'est d'autant plus affolant. D'où l'importance de l'accueil de manière intelligente et sensible pour leur donner un peu d'espoir.

Alice Isaaz

Pourquoi avoir accepté le rôle de cette institutrice ?

D'après moi, on n'accepte pas un rôle, mais on accepte de participer à une aventure avec un film, un réalisateur et des acteurs. J'adore les films historiques et c'est un trait de la Seconde Guerre mondiale qu'on a trop peu traité donc j'ai voulu y participer. Il y a quand même eu quasiment 10 millions de personnes sur les routes, soit un quart de la population de l'époque. Quand j'ai parlé à Christian Carion après avoir lu le scénario, je me suis rendue compte à quel point il avait l'envie de faire ce film avec tout son coeur et toutes ses tripes. Je me suis dit que je devais le suivre là-dedans.

Pensez-vous que l'histoire du film changera le regard des gens sur les déplacements de population ?

D'après moi, l'actualité touche déjà les gens. J'espère qu'ils se feront la même réflexion que moi en se disant que c'est tellement triste que 75 ans après, il y ait d'énormes similitudes. Il n'y a pas les chariots, ni les chevaux, mais c'est la même soif de survivre, la même énergie de désespoir. On a beau mettre des barbelés, ces gens feront tout pour survivre. Je trouve cela déplorable de voir l'Histoire se répéter.

Pour incarner l'institutrice, vous êtes-vous inspirée d'un personnage existant ou l'avez-vous pris tel qu'il était écrit ?

J'interprète en quelque sorte la maman de Christian, qui était éclaireuse et qui a vécu l'exode. Elle n'était pas institutrice donc il y a beaucoup de choses qui diffèrent de ce qu'elle a pu vivre. J'étais très honorée que Christian me confie ce rôle-là, mais quel que soit mon personnage, il s'agissait avant tout d'un devoir de mémoire et tous les acteurs sur ce film avaient ce même but.

Vous pensez que ce film a suffisamment de portée historique pour qu'il soit étudié à l'école ?

C'est prévu. Nous avons un partenariat avec l'Éducation nationale. Je crois que les élèves de 5ème verront le film et c'est super ! Je me souviens lorsque j'étais au collège et qu'on avait des séances cassettes, c'était des images d'archives qui, quand j'avais 11-12 ans, ne m'intéressaient pas vraiment.

publié le 2 novembre, Hawoly Ba

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