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Attentats de Paris : quel impact sur l'agenda des sorties cinéma ?

Made in France

© DR

Les terribles attentats qui ont touché Paris ce vendredi 13 novembre, faisant 130 morts et 351 blessés à l'heure où nous écrivons ces lignes, se sont répercutés de diverses manières sur l'industrie cinématographique, via la fermeture de la plupart des salles de la capitale durant le week-end, ou par la suspension des tournages parisiens jusqu'à ce dimanche 22 novembre. Et si certains films, à la thématique sensible, ont vu leur date de sortie repoussée de manière indéfinie, d'autres ont été maintenus dans le calendrier. État des lieux.

Mauvais timing

Le premier a avoir choisi la déprogrammation pure et simple de son film en salles est Nicolas Boukhrief, dont Made in France devait sortir ce mercredi. Le film raconte l'histoire d'un journaliste infiltrant une cellule djihadiste parisienne, et découvrant que ses membres préparent des attentats visant la capitale. Difficile de ne pas y voir une résonnance directe avec les événements du 13 novembre. Radar Films, qui produit, et Pretty Pictures, qui distribue le film, ont donc en toute logique immédiatement annoncé que la sortie de Made in France serait repoussée à une date ultérieure, encore non définie. Une décision largement soutenue par Nicolas Boukhrief lui-même, qui s'est confié à ce sujet à nos confrères de Première : "Je considère que les événements de ce vendredi 13 ne laissaient plus de place dans l'immédiat à une fiction de ce type, aussi juste soit-elle". Et s'il reste confiant sur le fait qu'il "y aura un temps pour montrer ce film, mais il faudra pour cela que nous soyons sorti de celui du deuil et du traumatisme", le cinéaste n'exclut pas la possibilité de voir Made in France sortir directement en VOD.

Parmi les autres modifications du calendrier, notons que le western Jane Got a Gun avec Natalie Portman, initialement prévu pour le 25 novembre, a également été décalé à plus tard. "Ce n'est en raison ni du titre, ni du sujet mais parce que nous voulons que ce film auquel nous croyons sorte dans de meilleures conditions d'un climat apaisé", a justifié le réalisateur Gavin O'Connor. De son côté, Plus fort que les bombes, présenté en mai dernier sur la Croisette, a été retitré Back Home, mais conserve sa date de sortie au 9 décembre. Notons enfin que Bastille Day, dans lequel un agent de la CIA tente de déjouer un attentat à Paris, et attendu courant 2016, pourrait lui aussi être mis en stand-by pendant un moment, bien que rien n'ait encore été confirmé à l'heure actuelle.

Un acte de résistance

D'autres en revanche, ont choisir de maintenir la date de sortie de leurs films, malgré le sujet plus que sensible de ceux-ci. C'est notamment le cas de Thomas Bidegain et de ses Cowboys, dans lequel François Damiens part à la recherche de sa fille disparue en remontant la piste d'une filière djihadiste. "Ça veut dire quoi de déprogrammer ? Ça veut dire que c'est Daesh qui va décider du calendrier des sorties cinéma en France ? Je crois que c'est un pouvoir qu'on ne peut pas leur laisser", explique le cinéaste au micro d'Allociné. Celui-ci regrette d'ailleurs le retrait du film de Nicolas Boukhrief, qu'il a "plus envie de voir depuis les attentats" parce qu'il a envie qu'on lui "explique le monde". Les Cowboys sortira donc comme prévu le 25 novembre prochain.

Même décision pour Taj Mahal de Nicolas Saada, qui revient sur une prise d'otages terroriste s'étant déroulée dans un palace de Bombay en 2008. Le film sera bien maintenu au 2 décembre prochain, comme l'a annoncé Mathieu Robinet de Bac Films en début de semaine : "Le déplacer aurait été une manière de capituler. Ce film est aussi un témoignage, une manière de permettre aux gens d'échanger, de parler. Il peut avoir une dimension cathartique". Idem pour le documentaire L'humour à mort, qui traite des attentats de Charlie Hebdo, qui sortira bien le 16 décembre prochain. "Face à la barbarie, nous devons plus que jamais nous battre pour la liberté d'expression et pour toutes les libertés", déclare à ce propos Roxane Arnold de Pyramide, comme nous le rapportent nos confrères du Film français.

Difficile, dans un contexte aussi tragique et sensible que celui-ci de savoir quelle est la meilleure position à adopter. Maintenir la sortie prochaine d'un film sur un sujet rappelant les attentats du 13 novembre est-il un acte incongru ou au contraire un acte militant ? Libre à chacun de se faire son propre avis sur le sujet. Tout comme il appartient à chacun, de manière plus générale, de reprendre ou non le chemin des salles obscures dans les prochains jours. Mais, comme l'évoque si bien Benoît Danard du CNC, "la meilleure façon de résister, est de ne pas changer ses habitudes".

publié le 22 novembre, Pauline Julien

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